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Mittwoch, 22. November 2023

GUY DE MAUPASSANT: IVETTE , Illustrations de CORTAZZO

Oreste Cortazzo, né à Rome le 1 et mort en 1910, est un peintre et graveur italien, originaire de Ceraso, dans la province de Salerne.

 

 

Artiste éclectique, Oreste Cortazzo a également illustré un grand nombre de livres d'Honoré de Balzac, notamment : La Rabouilleuse, Le Député d'Arcis, Petites misères de la vie conjugale, Peines de cœur d'une chatte anglaise, Physiologie du mariage.  (WIKIPEDIA)



En sortant du Café Riche, Jean de Servigny dit à Léon Saval : — Si tu veux, nous irons à pied. Le temps est trop beau pour prendre un fiacre.



 


 

Je suis, en attendant mieux, son fournisseur de livres.
Elle m'appelle son  " bibliothécaire ".

 

...montèrent au premier étage d'un bel hôtel moderne, et laissèrent aux mains de quatre domestiques en culotte coune leurs pardessus et leurs cannes.

 

Une sorte de maître des cérémonies, haut, droit, ventru,sérieux, la face encadrée de favoris blancs , s'approcha du nouveau-venu en demandant avec uncourt et fier salut : — Qui dois-je annoncer?

 


 

 

Et elle tendit au dernier venu sa petite main grande ouverte. Puis, elle demanda : — Est-ce que vous dansez, Muscade ? voyons, un tour de valse.

 Sans répondre, d'un mouvement rapide, emporté, Servigny lui enlaça la taille, et ils disparurent
aussitôt avec une furie de tourbillon. Ils allaient plus vite que tous, tournaient, tournaient, couraient en pivotant éperdûment, liés à ne plus faire qu'un, et le corps droit, les jambes presque immobiles, comme si une mécanique invisible, cachée sous leurs pieds, les eût fait voltiger ainsi.

 

Un homme maigre, brun, lent dans ses allures, s'approcha
: — Quel est le coupable?
dit-il avec un sourire contraint.

Un homme s'en venait, ventru, de haute taille, à favoris gris , parlant fort : — Mademoiselle
Yvette, je suis votre serviteur.
 

 
Mais elle aperçut, venant vers elle, un monsieur solennel et constellé de croix, et elle courut
à lui:
— Ah ! prince, prince, quel bonheur I
 
 

 

En face de la demeure, l'île de Croissy formait un horizon de grands arbres, une masse de verdure, et on voyait un long bout du large fleuve...

Personne ne dit rien pendant quelques minutes.
 



 ...et, ne la voyant pas trop irritée, il appliqua ses lèvres à la naissance du cou, sur le premier duvet doré des cheveux, à cet endroit charmant qu'il convoitait depuis si longtemps. Alors elle se débattit avec de grands sursauts  pour s'échapper. Mais il la tenait vigoureusement, et lui jetant son autre main sur l'épaule, il lui fit de force tourner la tête vers lui, et lui vola sur la bouche une caresse affolante et profonde.

 

Il sauta du lit, courut à sa fenêtre, l'ouvrit et aperçut Yvette, debout dans l'allée et qui lui
jetait à pleine main des poignées de sable dans la figure.


 

....puis s'assirent sur la berge, du côté du bras rapide, sous les saules, car il était trop tôt encore pour aller à la Grenouillière .
 

    Un immense  bateau, coiffé d'un toit, amarré contre la berge,
portait un peuple de femelles et de mâles attablés et buvant, ou bien debout, criant, chantant,
gueulant, dansant, cabriolant au bruit d'un piano geignard, faux et vibrant comme un chaudron.

 


    ...et le musicien semblait devenir enragé, tapait les touches d'ivoire avec des bondissements de la main, des gestes fous de tout le corps, en balançant éperdument sa tête abritée de son immense couvre-chef.
 

Elle fut déshabillée la première et elle l'attendit, debout, sur la rive, souriante sous tous les regards. 

 

Elle nageait avec bonheur, avec ivresse, toute caressée par l'onde, frémissant d'un plaisir sensuel,
soulevée à chaque brasse comme si elle allait s'élancer hors du fleuve.


Il la vit sortir de l'eau, ramasser son peignoir et gagner sa cabine sans s'être retournée.


Alors la jeune fille, s'asseyant aux pieds de sa mère dans une pose câline qui lui était familière,
et pressant ses mains, ajouta : — Il m'a demandée en mariage.
M"' Obardi fit un geste brusque de stupéfaction, et s'écria : — Servigny? mais tu es folle!


 
La marquise ayant pris le bras de Saval, il prit celui d'Yvette et ils se mirent à tourner autour du
gazon, paraissant et disparaissant à tout moment derrière les massifs et les bouquets d'arbres.


Et Yvette, prenant un ouvrage de broderie qu'elle appelait le « salut public », et dont elle occupait ses mains cinq ou six fois l'an, aux jours de calme plat, s'assit sur une chaise basse auprès de sa mère, tandis que les deux jeunes gens, à cheval sur des pliants, fumaient des cîgares.


Et sans ôter sa robe ruisselante et collée à sa chair, elle tomba sur les genoux en joignant les
mains, implorant dans sa détresse quelque protection surhumaine, le secours mystérieux du
ciel, l'aide inconnue qu*on réclame aux heures de larmes et de désespoir.


Le lendemain, dès le matin, Yvette s en alla toute seule s*asseoir à la place où Servigny lui
avait lu l'histoire des fourmis. Elle se dit : — Je ne m'en irai pas de là avant d'avoir pris une résolution.


...elle le passa tout entier sur la terrasse, étendue sur une chaise longue en osier. Elle ne pensait presque à rien, très résolue et très tranquille.


Une horrible angoisse lui serra le coeur. Le clair soleil tombait à flots sur la campagne et l'air doux du matin entrait par la fenêtre. Elle s'assit, pensant à cela: Morte.




Elle aperçut des chevaux de bois et força Belvigne à monter à sa droite tandis que son détachement
escaladait par derrière les bêtes tournantes. Quand le divertissement fut terminé, elle refusa de descendre, contraignant son escorte à demeurer cinq fois de suite sur le dos de ces montures d'enfants, à la grande joie du public qui criait des plaisanteries. 

 


Servigny avait acheté chez un marchand du pays des vêtements d'ouvrier, un pantalon de velours,
une chemise à fleurs, un tricot, une blouse, et il parlait à la façon des gens du peuple.


Yvette prit la bouteille, la déboucha et versa un peu de liquide sur le coton. Une odeur puissanté, sucrée, étrai^ge, se répandit ; et comme elle approchait de ses lèvres le morceau de ouate, elle avala brusquement cette saveur forte et irritante qui la fit tousser. Alors, fermant la bouche, elle se mit
à l'aspirer.


Elle était sur un grand bateau qui passait le long d'un beau pays tout couvert de fleurs. 


....et Servigny, habillé en prince, venait la chercher pour la conduire à un combat de taureaux.


Yvette avait des ailes maintenant. Elle volait, la nuit, par une belle nuit claire, au-dessus des
bois et des fleuves. Elle volait avec délices, ouvrant les ailes, battant des ailes, portée par le
vent comme on serait porté par des caresses....et elle se trouvait assise au bord d'un étang, une ligne à la main ; elle péchait. Quelque chose tirait sur le fil qu'elle sortait de l'eau, en amenant un magnifique collier de perles, dont elle avait eu envie quelque temps auparavant.
 
,
 ...et elle regardait Servigny, venu à côté d'elle sans qu'elle sût comment, péchant
aussi et faisant sortir de la rivière un cheval de bois.
  


Alors Servigny, cueillant les roses rouges du gros rosier poussé le long du mur et les boutons
pas encore éclos, se mit à les lancer dans la chambre par la fenêtre.


Puis, d'un saut, s'accrochânt au balcon, il s'enleva par les poignets, fit un rétablissement comme un gymnaste et franchit la balustrade.


Mais Servigny s'étant retourné, vit une lettre sur la table. Il la saisit d'un mouvement rapide et
lut l'adresse. Il comprit et pensa : « Peut-être ne faut-il pas que la marquise ait connaissance de
cela. )) Et, déchirant l'enveloppe, il parcourut d'un regard les deux lignes qu'elle contenait :
« Je meurs pour ne pas devenir une fille entretenue. «
Yvette.
« Adieu^ma chère maman. Pardon. »






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