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Montag, 18. Oktober 2021

LES MISÉRABLES par Victor Hugo, Dessins par Gustave Brion, Deuxième Partie

Gustave Brion, peintre régionaliste, il produit notamment des scènes de genre alsaciennes. Il illustre également Les Misérables de Victor Hugo.

 

 COSETTE

LIVRE PREMIER - WATERLOO

Esquisser ici l'aspect de Napoléon, à cheval, sa lunette à la main, sur la hauteur deRossomme,
à l'aube du 18 juin 1815, cela est presque de trop. Avant qu'on le montre, tout le monde l'a vu. Ce profil calme sous le petit chapeau de l'école de Brienne, cet uniforme vert,....


Un sergent des gardes anglaises, le premier boxeur de l'Angleterre, réputé par ses compagnons invulnérable, y avait été tué par un petit tambour français. 

 

Ils montaient, graves, menaçants, imperturbables; dans les intervalles de la mousqueterieet de l'artillerie, on entendait ce piétinement colossal. Etant deux divisions, ils étaient deux colonnes; la
division Wathier avait la droite, la division Delort avait la gauche. On croyait voir de loin s'allonger vers la crête du plateau deux immenses couleuvres d'acier. Cela traversa la bataille comme un prodige.

...cavaliers et chevauxy roulèrentpêle-mêle se broyant les uns les autres, ne faisant qu'une chair dans
ce gouffre, et quand cette fosse fut pleine d'hommes vivants, on marcha dessus et le reste
passa. Presque un tiers de la brigade Dubois croula dans cet abîme.Ceci commença la perte de la bataille.

Le joueur de cornemuseau centre, pendant qu'on s'exterminait autour delui, baissant dans une inattention profonde son oeil mélancolique plein du reflet des forêts et des lacs, assis sur un tambour, son pibroch sous le bras, jouait les airs de la montagne.

A la nuit tombante, dans un champ près de Genappe, Bernard et Bertrand saisirent par un
pan de sa redingote et arrêtèrent un homme hagard, pensif, sinistre, qui, entraîné jusquelà
parle courant de la déroute, venait de mettre pied à terre, avait passé sous son bras la
bride de son cheval, et l'oeil égaré, s'en retournait seul vers Waterloo. C'était Napoléon essayant
encore d'aller en avant, immense, somnambule de ce rêve écroulé.

Le rôdeur nocturne que nous venons de faire entrevoir au lecteur allait de ce côté. Il furetait
cette immense tombe. Il regardait. Il passaiton ne sait quelle hideuse revue des moits. Il marchait les pieds dans le sang. Tout à coup il s'arrêta. A quelques pas devant lui, dans le chemin creux, au point où finissait le monceau des morts, de dessous cet amas d'hommes et de chevaux, sortait une main ouverte, éclairée par la lune.


LIVRE DEUXIÈME—LE VAISSEAU LORION

...on croit que le diable a, de temps immémorial, choisi la forêt pour y cacher ses trésors. Les bonnes femmes affirment qu'il n'est pas rare de rencontrer, à la chute du jour, dans les endroits écartés du bois, un homme noir, ayant la mine d'un charretier ou d'un bûcheron, chaussé de sabots, vêtu d'un pantalon et d'un sarrau de toile; et reconnaissable en ce que, au lieu de bonnet ou de chapeau, il a deux immenses cornes sur la tête. Ceci doit le rendre reconnaissable en effet. Cet' homme est habituellement occupé à creuserun trou. 

 

LIVRE TROISIÈME
ACCOMPLISSEMENT DE LA PROMESSE FAITE A LA MORTE

De temps en temps, un des buveurs regardaitdans la rue et s'exclamait:—Il fait noir comme
dans un four! — ou : — Il faut être chat pouraller dans la rue sans lanterne à cette-heure-ci!


Au moment où Cosette sortit; son seau à la main, si morne et si accablée qu'elle fût, elle ne put s'empêcher de lever les yeux sur cette prodigieuse poupée, vers la dame, comme elle l'appelait. La pauvre enfant s'arrêta pétrifiée. Elle n'avait pas encore vu cette poupée de près. Toute cette boutique lui semblait un palais; cette poupée n'était pas une poupée, c'était une vision. 

 


Elle leva la tête. Une grande forme noire, droite et debout, marchait auprès d'elle dans l'obscurité. C'était un homme qui était arrivé derrière elle et qu'elle n'avait pas entendu venir. Cet homme, sans dire un mot, avait empoigné l'anse du seau qu'elle portait. Il y a des instincts pour toutes les rencontres
de la vie. L'enfant n'eut pas peur.

 

Il avait un chapeau rond fort vieux et fort brossé, une redingote râpée jusqu'à la corde en gros drap
jaune d'ocre, couleur qui n'avait rien de trop bizarre à cette époque, un grand gilet à poches de forme séculaire, des culottes noires devenues grises aux genoux, des bas de laine noire et d'épais souliers à boucles de cuivre. On eùt dit un ancien précepteur de bonne maison revenu de l'émigration,...


Eponine et Azelma ne faisaient aucune attention à ce qui se passait. Elles venaient d'exécuter
une opération fort importante; elles s'étaient emparées du chat. Elles avaient jeté la poupée à terre, et Éponine, qui était l'aînée, emmaillottait le petit chat, malgré ses miaulements et ses contorsions, avec une foule de nippes et de guenilles rouges et bleues.

 

 
Cosette considérait la poupée merveilleuse avec une sorte de terreur. Son visage était encore
inondé de larmes, mais ses yeux commençaient à s'emplir, comme le ciel au crépuscule du matin, des rayonnements étranges de la joie....—Je l'appellerai Catherine, dit-elle.

 

Il traversa un corridor et parvint à l'escalier. Là il entendit un petit bruit très-doux qui ressemblait à une respiration d'enfant. Il se laissa conduire par ce bruit et arriva à une espèce d'enfoncement triangulaire
pratiqué sous l'escalier ou pour mieux dire formé par l'escalier même. Cet enfoncement n'était autre chose que le dessous des marches. Là, parmi toutes sortes de vieux paniers et de vieux tessons, dans la poussière et dans les toiles d'araignée, il y avait un lit; si l'on peut appeler lit une paillasse trouée jusqu'à
montrerla paille et une couverture trouée jusqu'à laisser voir la paillasse. Point de draps. Cela était posé à terre sur le carreau. Dans ce lit Cosette dormait. L'homme s'approcha, et la considéra. Cosette dormait profondément,elle était tout habillée. L'hiver elle ne se déshabillaitpas pour avoir moins froid. Elle tenait serrée contre elle la poupée dont les grands yeux ouverts brillaient dans l'obscurité.



 Il n'y avait rien.dans ce sabot. L'étranger fouilla dans son gilet, se courba et mit dans le sabot de Cosette un louis d'or. Puis il regagna sa chambre à pas de loup.

 


 L'homme ouvrit le portefeuille et en tira, non la poignée de billets de Banque qu'attendait Thénardier,
mais un simple petit papier qu'il développa et présenta tout ouvert à l'aubergiste en disant :
— Vous avez raison. Lisez.
Le Thénardier prit le papier et lut: M.—sur M.—, le 25 mars 1823. Monsieur Thénardier. Vous remettrez Cosette à la personne. — On vous payera toutes les petites choses. J'ai l'honneur de vous saluer avec considération. FANTINE.

 

LIVRE QUATRIÈME—LA MASURE GORBEAU

Un soir que Jean Valjean passait par là, il n'avait pas Cosette avec lui, il aperçut le mendiant à sa place ordinaire sous le réverbère qu'on venait d'allumer. Cet homme, selon son habitude, semblait prier et était tout courbé. Jean Valjean alla à lui et lui mit dans la main son aumône accoutumée. Le mendiant leva brusquement les yeux, regarda fixement Jean Valjean, puis baissa rapidement la tête. Ce mouvement fut comme un éclair, Jean Valjean eut un tressaillement.

 


— Viens, dit-il à Cosette. Il la prit parla main etils sortirenttous deux.


LIVRE CINQUIÈME—ACHASSE NOIRE MEUTE MUETTE

 

Tout à coup elle entendit la voix de Jean Valjean qui lui criait, tout en restant très-basse:
—Adosse-toi au mur.
Elle obéit.
—Ne dis pas un mot et n'aie pas peur, reprit JeanValjean.
Et elle se sentit enlever de terre. Avant qu'elle eût le temps de se reconnaître, elle était au haut de la muraille.


Il s'approcha de Cosette. Elle dormait.
 

Un être qui resemblait a un homme...

Les deux hommes se chauffaient accoudés sur une table où Fauchelevent avait posé un
morceau de fromage, du pain bis, une bouteille de vin et deux verres, et le vieux disait à Jean
Valjean en lui posant la main sur le genou: —Ah! père Madeleine! vous ne m'avez pas
reconnu tout de suite! vous sauvez la vie aux gens, et après vous les oubliez! Oh! c'est mal!
eux ils se souviennent de vous! vous êtes un ingrat!
 
 

LIVRE SIXIÈME - LE PETIT-PICPUS 


En outre, il y a toujours une religieuse à genoux devant la saint sacrement. Cette station
dure une heure. Elles se relèvent comme les soldats en faction. C'est là l'Adoration Perpétuelle.

 

A l'époque où se passe cette histoire, un pensionnat était joint au couvent. Pensionnat de jeunes filles nobles, la plupart riches, parmi lesquelles on remarquait mesdemoiselles de Sainte-Aulaire et de Bélissen et une Anglaise portant l'illustre nom catholique de Talbot.


Cette femme, de trente ans à peine, brune, assez belle, regardait vaguementavec de grands yeux noirs. Voyait-elle? On en doutait. Elle glissait plutôt qu'elle ne marchait; elle ne parlait jamais; on n'était pas bien sûr qu'elle respirât. Ses narines étaient pincées et livides comme après le dernier soupir. Toucher sa main, c'était toucher de la neige. Elle avait une étrange grâce spectrale. Là où elle entrait, on avait froid. Un jour une soeur, la voyant passer, dit à une autre: Elle passe pour morte.—



Quand un grand personnage, un maréchal de France, un prince, un duc et pair, traversait une ville de Bourgogne ou de Champagne, le corps de ville venait le haranguer et lui présentait quatre gondoles
d'argent dans lesquelles on avait versé de quatre vins différents. Sur le premier gobelet on lisait cette inscription: vin de singe, sur le deuxième: vinde lion, sur le troisième: vin demouton, sur le quatrième:vin de cochon. Ces quatre légendes exprimaient les quatre degrés que descend l'ivrogne: la première ivresse, celle qui égayé; la deuxième, celle qui irrite, la troisième, celle qui hébète; la dernière enfin, celle qui abrutit.

 

LIVRE SEPTIÈME-PARENTHÈSE

Le couvent espagnol surtout est funèbre.
 
 

Mais ces hommes, ou ces femmes, qui sont derrière ces quatre murs, ils s'habillent de bure, ils sont égaux, ils s'appellent frères,c'est bien; mais ils font encore autre chose?

Oui.
Quoi?
Ils regardent l'ombre, ils se mettent à genoux.


LIVRE HUITIEME
LES CIMETIÈRES PRENNENT CE QU'ON LEUR DONNE


Le jardinier fit un salut craintif, et resta sur le seuil de la cellule. La prieure, qui égrenait son rosaire, leva les yeux et dit:

— Ah! c'est vous, père Fauvent. Cette abréviation avait été adoptée dans le couvent. Fauchelevent recommença son salut. -Père Fauvent, je vous ai fait appeler. — Me voici, révérende mère.
—J'ai à vous parler.
—Et moi, de mon côté, dit Fauchelevent.


Écoute-moi bien, ma petite Cosette. Il faudra nous en aller de cette maison, mais  nous y reviendrons et nous y serons tres-bien. Le bonhomme d'ici t'emportera sur son dos là dedans. Tu m'attendras chez une dame. J'irai te retrouver. Surtout, si tu ne veux pas que la Thénardierte reprenne, obéis et ne.dis rien!


Fauchelevent regarda cet inconnu. — Qui êtes-vous? demanda-t-il? L'homme répondit: — Le fossoyeur. Si l'on survivait à un boulet de canon en pleine poitrine, on ferait la figure que fit Fauchelevent.
— Le fossoyeur!
—Oui.
— Vous! - Moi. -


Quandle fossoyeur eut disparu dans le fourré, Fauchelevent écouta jusqu'à ce qu'il eût entendu
le pas se perdre, puis il se pencha vers la fosse et dit à demi-voix:
                                                                 — Père Madeleine!
                                                                   Rien ne répondit.

Fauchelevent prit la pelle et Jean Valjean la pioche, et tous deux firent l'enterrement de
la bière vide.


Il était visible que le fossoyeur avait éperdument cherché sa carte, et fait tout responsable de cette perte dans le galetas, depuis sa cruche jusqu'à sa femme. Il avait l'air désespéré.

 

La prieure, son rosaire à la main, les attendait. Une mère vocale, le voile bas, était debout
près d'elle. Une chandelle discrète éclairait, on pourrait presque dire faisait semblantd'éclairer le parloir. La prieure passa en revue Jean Valjean. Rien n'examine comme un oeil baissé. Puis elle le questionna: — C'est vous le frère?
— Oui, révérende mère, répondit Fauchelevant.



Cette bicoque, bâtie en plâtras, qui existait encore en 1845, était composée, comme on sait, de trois chambres, lesquelles étaient toutes nues et n'avaient que les murailles.

 

Cosette avait permission de venir tous les jours passer une heure près de lui. Comme les soeurs étaient tristes et qu'il était bon, l'enfant le comparait et l'adorait. 
 

Quelquefois il s'accoudait sur sa bêche et descendait lentement dans les spirales sans fond de la rêverie..
Il se rappelait ses anciens compagnons; comme ils étaient misérables;....



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